jeudi 27 décembre 2018

Inventaire numéro 51 - Violenza

KAT ONOMA The Animals

KAT ONOMA
Stock Phrases

Label : Just'in Distribution
Année : 1989
A1 The Animals    
A2 Private Eye
A3 Lady M.
A4 Lifeguard's Ditty
B1 A Wind That Hungers
B2 The Landscape
B3 Four Color Game
B4 Ashbox
B5 Worst Friend

Genre : Rock cubiste
8° morceau de L'Inventaire 51 : The Animals

Parce que ses membres étaient moins crétins que les Ramones, Kat Onoma eut vite fait de se faire taxer de "rock intello". 
C'est sûr qu'avec ses mises en musique de poème ou ses paroles tirées du Livre des ecclésiastes, Rodolphe Burger, chanteur et guitariste du groupe, envoie le rock français dans une galaxie à laquelle Jean-Louis Aubert n'avait jamais aspiré. Mais c'est surtout au niveau du son et de la production que Kat Onoma laisse beaucoup de monde à la traine. La sempiternelle formule guitare/basse/batterie est ici augmentée d'un trompettiste, Guy Bix Bickel, qui occupe de façon peu orthodoxe, nerveuse et puissante, l'espace laissé par le reste du groupe. 
Ce deuxième LP, enregistré à Bruxelles, un an après le confidentiel Cupid, va les mettre dans la lumière, notamment grâce au single The Animals dont le clip tourne miraculeusement sur M6. Ils resteront cependant estampillés groupe France Inter/Télérama parce que dans ce pays, on aime bien les étiquettes et que le rock sente un peu des pieds. 
L'affaire durera cinq albums studio et deux live, Burger continuera en solo à sortir des albums, accompagnera d'autres artistes, des lectures, du cinéma et offrira à Bashung le terrible Samuel Hall, un morceau écrit à l'origine pour Kat Onoma, mais dont il était convaincu que Bashung le chanterait mieux que lui. La classe, non ?

LOS BRAVOS I'm cuttin' out

LOS BRAVOS
Black is black

Label : Barclay/Decca
Année : 1966
A1 Trapped
A2 Baby, Baby
A3 Make It Easy For Me
A4 She Believes In Me
A5 Will You Always Love Me
A6 Black Is Black
B1 Stop That Girl
B2 Give Me A Chance
B3 I'm Cuttin' Out
B4 Two Kinds Of Lovers
B5 You Won't Get Far
B6 Baby, Believe Me 

Genre : Jerk endiablé
7° morceau de L'Inventaire 51 : I'm cuttin' out

C'est peut-être le plus connu des groupes espagnols (qui a dit Las Ketchup ?), essentiellement pour un tube, Black is black, que même Johnny Hallyday reprendra dans une version française assez baroque. 
Le chanteur de Los Bravos est d'origine allemande, sa voix est puissante et son accent anglais tient bien la route. Le reste du groupe vient des quatre coins d'Espagne et assure le service minimum sans faire trop d'étincelles non plus. Pour le reste, ça dépend essentiellement des compositions qu'on leur refile, entre rock, rhythm'n'blues et pop parfois un peu niaise.
Ce n'est pas le cas de cet I'm cuttin' out au tempo infernal, sélectionné pour ce mix. Il est dû au tandem  Martin/Coulter, un Écossais et un Irlandais du nord qui écrivaient aussi pour les Troggs, Cliff Richard, Elvis Presley... et occupèrent plusieurs fois la première place des charts anglais, notamment avec Puppet On A String interprété par Sandie Shaw.
Cet album sera le seul véritable succès international de Los Bravos. Ils restent des stars en Espagne avec les deux suivants et, certainement inspirés par l'exemple des Beatles, tournent même dans deux films où ils jouent "leur propre rôle". En 1968, leur clavier Manolo Fernandez se suicide, mais le groupe continue avec un remplaçant. Dans la foulée, le chanteur Mike Kennedy cède sa place et sera finalement remplacé par un Anglais, Andy Anderson, frère du Jon Anderson coupable des parties de clavier du groupe Yes
Malgré tous ces bouleversement, Los Bravos sortent des albums jusqu'en 1970. je ne connais personne qui les a écoutés...

BREATHER Embrace On The Summit

BREATHER
Loves and Disloves

Label : Sonic Incision Records
Année : 1981
A1 Radiation    
A2 Maya    
A3 Embrace On The Summit    
A4 Melting Of The Guns    
A5 Behold The Power (Behold The Love)    
B1 Miami    
B2 Dank Ashes    
B3 Watching You Grow
B4 Bury The Mystique

Genre : Darkindusexperimentalsongs
6° morceau de L'Inventaire 51 : Embrace On The Summit

A un moment il faut y aller. Le disque est perdu dans un bac au milieu de dizaines d'autres. La pochette vous fait vaguement de l’œil mais rien n'est familier là-dedans. Ni le nom du groupe, ni celui des musiciens qui le composent, encore moins celui du label ("Sonic Incision Records", ça sent le déséquilibre mental) dont cet album porte le numéro 001 et sera l'unique référence. 
C'est pourtant bien pour ça qu'on fouille les bacs. Pour découvrir, explorer cette zone obscure des disques orphelins, là où la main de l'homme n'a que très peu laissé trainer son oreille. La déception est souvent au rendez-vous, la plupart du temps le disque retourne dans cet oubli qu'il n'aurait jamais dû quitter... Mais pas cette fois.
Breather serait donc un duo de San Francisco qui n'aurait réalisé que cet album en 1981. Le verso de la pochette annonce bien une version cassette de l'album avec trois titres supplémentaires mais un peu d'exploration virtuelle nous apprend que l'objet n'a jamais vu le jour. Le disque ne s'est pas vendu, le groupe s'est dissout et Bliss Blast,qui chantait, jouait de la basse et du clavier dans le groupe est aujourd'hui membre d'une communauté de jardiniers, constructeurs, artistes et activistes de tout poil qui ont développé un village écologique... 
En 2010, contacté par un fan tardif, il avouait avoir retrouvé une dizaine d'exemplaires neufs de cet album, qu'il était prêt à céder pour un prix raisonnable à qui en voudrait. C'est peut-être un peu tard mais ça valait le coup. Basse en avant couplée avec des bruits de machines et des percussions métalliques typiques de l'indus', chant grave et mélancolique qui rappelle immanquablement la voix imprécise mais hantée de Ian Curtis de Joy Division, mélodies simples, discrètes, mais mélodies quand-même : il y a quelque chose. 
A l'instar d'Embrace On The Summit qui vient plomber notre mix numéro 51, il y a dans chacune de ces neuf chansons un climat, un mystère, un pouvoir suggestif. Comme lorsqu'on a découvert Crime & The City Solution, on finit l'écoute un peu déstabilisé, pas franchement joyeux, mais avec une curieuse envie d'y revenir pourtant.


NATALIE COLE Unpredictable You


NATALIE COLE
A : I Got Love On My Mind
B : Unpredictable You

Label : Capitol
Année : 1977
Genre : Disco funk
5° morceau de L'Inventaire 51 : Unpredictable You

Elle est la fille de l'immense Nat King Cole, pianiste, compositeur et crooner à la voix douce, connu entres autres pour sa classieuse version de Quizas, Quizas, Quizas
Natalie Cole débarque dans le bizness de la musique au beau milieu des années 70, alors qu'émerge la vague disco. Ses albums alternent les ballades sirupeuses et les munitions pour pistes de danses qu'elle enflamme de sa voix qui sait se faire tour à tour suave et puissante. A l'image de ce disque dont la face A est un slow baveux, magnifiquement chanté mais pas franchement excitant. En face B, sur le redoutable Unpredictable You, Natalie se promène du grave à l'aigu avec une aisance d'autant plus efficace que derrière s'agitent quelques pointures du funk chicagoan. Et c'est pour ça qu'on aime le format 45t : il offre deux faces, et donc deux chances de décrocher le gros lot...
Plus tard, Natalie Cole laissera tomber le groove, retournera vers le jazz et réalisera un duo virtuel (Unforgettable) avec son père décédé en 1965 : un tube ! 
Elle est morte en 2015 en laissant derrière elle une large discographie qui pourrait bien receler d'autres surprises.

PALE SAINTS Way The World Is

PALE SAINTS
The Comforts of Madness

Label : 4AD
Année : 1990
A1 Way The World Is
A2 You Tear The World In Two
A3 Sea Of Sound
A4 True Coming Dream
A5 Little Hammer
B1 Insubstantial
B2 A Deep Sleep For Steven
B3 Language Of Flowers
B4 Fell From The Sun
B5 Sight Of You
B6 Time Thief 

Genre : Mystic shoegaze
4° morceau de L'Inventaire 51 : Way The World Is

En 1990, quand sort ce premier album des Pale Saints, Bernard Lenoir vient de retrouver l'antenne de France Inter, Les Inrockuptibles est encore une revue qui fait rêver et le retour de la brit pop s'annonce comme un phénomène excitant pour cette partie de la jeunesse qui demande à la musique d'exprimer l'inexprimable. 
Outsiders absolus, les Pale Saints débarquent de nulle part (de Leeds en réalité, mais ça pourrait tout aussi bien être de la planète Mars) avec des couches de guitares saturées pour porter la voix éthérée de Ian Masters dont les textes sont aussi mystérieux que ceux de Guy Chadwick de House of Love, autre héros maudit de l'époque. 
Les mélodies aussi, qui semblent flotter en suspend quelque part dans l'atmosphère, à la fois mélancoliques et pourtant lumineuses. A l'image de ce Way The World Is qui ouvre l'album, les chansons émergent du bruit, de la confusion, d'un marécage sonore indéfinissable pour s'élever vers des hauteurs parfois mystiques ou se transformer en d'étranges comptines (Little Hammer). On pense parfois à Galaxie 500, la voix de canard en moins, et aussi à Cocteau Twins et d'autres groupes de l'écurie 4AD qui, logiquement, signe les Pale Saints.  
On assimile souvent le groupe au courant "Shoegaze" (Slowdive, Ride, Lush, My Bloody Valentine) sauf que ces groupes étaient censés jouer de la guitare saturée la tête baissée vers leurs pompes, tandis que Pale Saints lève ostensiblement la tête vers les cieux...
Leur étrange singularité ne tiendra pas longtemps cependant. Dès le deuxième album, l'arrivée de  Meriel Barham engagera le groupe vers la voix de la normalité. Ian Masters quittera les Pale Saints avant l'anecdotique et dernier troisième album. 

THE LAST POETS Black is

THE LAST POETS
This is Madness

Label : Celluloid (Ori : Douglas)
Année : 1971
A1 True Blues
A2 Related To What Chant
A3 Related To What
A4 Black Is Chant
A5 Black Is
A6 Time
A7 Mean Machine Chant
A8 Mean Machine
B1 White Man's Got A God Complex
B2 Opposites
B3 Black People What Y'All Gon' Do Chant
B4 Black People What Y'All Gon' Do
B5 O.D.
B6 This Is Madness Chant
B7 This Is Madness

Genre : Grand Slam
3° morceau de L'Inventaire 51 : Black is Chant/Black is

Leur nom paraît terriblement prétentieux. Les derniers poètes. Et après ? En fait, le nom vient d'un écrivain sud-africain, Little Willie Copaseely, qui pensait faire partie de la dernière vague des poètes avant que les armes ne prennent le dessus.
Peut-être fallait-il l'entendre aussi dans le sens des "nouveaux" poètes, comme on parle du "dernier" album de Machin... 
Mais en fait peu importe : The Last Poets est avant tout une forme inédite, un trio vocal issu du mouvement des droits civiques qui émerge au début des années 70 aux États-Unis et pratique une sorte de politique poétique, exécutée à grands coups de slams, généralement accompagnés par un percussionniste, parfois par un cuivre ou d'autres instruments (on recommande l'album Delights of the Gardens avec le funky drummer Bernard Purdie).
Avec Gil Scott-Héron, ils annoncent clairement l'avènement du rap. Mais en fait leur forme est tellement épurée, leur maîtrise de la métrique tellement impressionnante et leur scansion tellement mélodique qu'ils dépassent ce statut de précurseurs. Les Last Poets sont les inventeurs de leur propre forme. Même les morceaux les plus minimalistes transpirent la profondeur de la soul, l'énergie du funk et la liberté du jazz. Leurs disques ne vieillissent pas et, malheureusement, leur message non plus...
Ainsi, n'importe quel morceau aurait trouvé sa place dans un mix, mais c'est Black is qui l'a emporté, peut-être pour cette strophe :
Black is digging John Coltrane
John Coltrane as he blows
No, not as he blows
But as he tells you of his life
Which is his peoples' lives
Which is all our lives
Blow, Trane, blow
Listen, black people, listen
Listen to Trane as he blows away your life
    

REDSKINS Unionize

REDSKINS
The Peel Sessions

Label : Strange Fruit Records
Année : 1987 (enr : 1982)
A1 Unionize
A2 Reds Strike The Blues
B1 Kick Over The Statues
B2 The Peasant Army

Genre : Punk & Politic
2° morceau de L'Inventaire 51 : Unionize

Il n'existe qu'un album studio des Redskins. Il sort tardivement, en 1986, alors que Nick King, l'un des membres fondateurs, a déjà raccroché les gants. Groupe radical par ses idées (deux de ses membres sont encartés au Socialist Workers Party), ils militeront activement contre Margaret Thatcher et refuseront de se joindre à Paul Weller et Billy Bragg pour soutenir le parti travailliste qu'ils trouvent trop mollasson. 
Pour autant, leur musique directement influencée par les Sex Pistols et les Clash garde une certaine fraicheur, voire une joie, particulièrement palpable sur ces titres issus d'une Peel Session enregistrée le 9 octobre 1982 et diffusée le lendemain sur les ondes de la BBC 1. Probablement parce qu'ils sont rejoints ici pour la première fois par un trompettiste, un tromboniste et un saxophoniste qui accentuent leur énergie brute et donnent un peu de lyrisme à cette révolte viscérale qui les caractérise. On sent que les influences de soul et rhythm'n'blues ne sont pas loin, même si le groupe n'aura jamais la richesse métissée des Clash ni la perfection d'écriture des Buzzcocks. Des seconds couteaux éminemment sympathiques, emblématiques d'un contexte où la révolte en musique était joyeuse et naturelle. Les paroles d'Unionize restent d'ailleurs d'actualité en 2019 :  
"We can talk of riots and petrol bombs
And revolutions all day long
But if we fail to organise
We'll waste..."

GERARDO IACOUCCI Violenza

CRIMINALE 4
Violenza (compilation)

Label : Penny Records
Année : 2015
A1 Daniela Casa : Contestation
A2 Remigio Ducros : Baterasso    
A3 Piero Montanari : Lupin    
A4 Paolo Ferrara, Massimo Di Cicco : Metal    
A5 Stelvio Cipriani : Danger Flight Slow A6 F. Tamponi, Stefano Torossi, Sandro Brugnolini, Marcello Catalano : Fuorilegge    
A7 Gerardo Iacoucci : Violenza    
A8 Stellio Subelli : Diatomea    
A9 Joel V.D.B. : Hertz Blues    
B1 Nino Rapicavoli : Dispersione    
B2 Enzo Scoppa : Raggio Zero
B3 Remigio Ducros : Canottaggio    
B4 Massimo Catalano, Remigio Ducros : Lunedi Ore 7.45    
B5 Daniela Casa : N' 1 Chitarra   
B6 Paolo Ferrara : Afrotheme    
B7 Stelvio Cipriani : Alligator Terror    
B8 Piero Montanari : Saigon Night    
B9 Alessandro Alessandroni : Tea Room  

Genre : B.O. et illustration sonore very funky
1° morceau de L'Inventaire 51 : Violenza

Nous croulons sous les compilations. La collection Criminale qui compte à ce jour 4 volumes édités par le micro label italien Penny Records se distingue pourtant du tout venant par la rareté, la qualité et la cohérence des morceaux rassemblés. On y trouve une profusion d'instrumentaux italiens piochés dans le réservoir de la décennie 1968-1978 durant laquelle compositeurs et musiciens de studios alimentaient de façon stakhanoviste les bandes originales de cinéma de genre et les disques d'illustration sonore. Tous y sont passés, y compris le plus grand d'entre tous, Ennio Morricone. Mais ici, même si on reconnaît un ou deux noms dans la liste (Stelvio Cipriani, recyclé par Quentin Tarantino) on nage quand-même la plupart du temps dans des eaux inconnues. 
Et pourtant, il n'y a rien à jeter* dans cette série de morceaux courts. De petites pièces à dominante rythmique funk-jazz, qui instaurent des climats de suspense, d'angoisse mais aussi parfois une certaine mélancolie,le tout rappelant immanquablement les ambiances des gialli, ces thrillers italiens typiques de la décennie. 
Si l'alliance basse-batterie mène la danse (à l'exception du premier morceau, une improvisation de guitare saturée un peu décalée par rapport au reste de l'album) c'est dans la richesse des timbres et de l'instrumentation que réside toute la séduction : nappes frémissantes de synthétiseurs, multiples percussions, orgues, clavecin, cuivres et flûte... Il s'agit d'instaurer des climats, d'accompagner des images qui n'existeront peut-être jamais que dans la tête de l'auditeur.
Ainsi le Violenza qui ouvre le mix, avec son jeu de réponses basse/piano, raconte une histoire mystérieuse avec un groove irrésistible. Difficile pourtant de savoir s'il a réellement figuré au générique d'un film, même si le morceau faisait déjà partie de la compilation Italian B-Movies, sortie en 2008 chez Primrose Music... On croule, vous dis-je !

*A part la pochette, peut-être la plus hideuse de la série, et c'est pas peu dire !


mercredi 18 avril 2018

Inventaire 50 - They Keep Silence


HUGO BLANCO El Cigarron

HUGO BLANCO et sa harpe indienne

A : El Cigarron/Orquidea Arabe
B : El Herrero/Cuerdas de plata
Label : Polydor
Année : 1962
Genre : Orquidea
7° morceau de L'Inventaire 50 : El Cigarron

Par nos latitudes on ne sait pas grand chose d'Hugo Blanco. Discogs référence pourtant 53 albums sous son nom. 
La pochette de ce "super 45t" (4 titres : une spécialité française) l'appelle "Monsieur MOLIENDO CAFE", rapport à son tube homonyme, enregistré à 18 ans, qui fit le tour du monde et dont vous connaissez forcément la mélodie.
On lui attribue la création d'un style musical, l'"Orquidea" mélange d'une sorte de fandango typique du Vénézuela, le Joropo, et de musique cubaine. On lui doit paraît-il aussi la création du premier groupe de ska vénézuélien dont il a produit le premier album : Las Cuatro  Monedas A Go-Go. Multi-instrumentiste, ses préférences vont au Cuatro, guitare latino à quatre cordes, et à la harpe indienne comme c'est marqué sur la pochette. En revanche, on ne sait pas qui sont cet étrange percussionniste masqué et cette dame avec la jupe léopard qui joue des maracas...

B.T. EXPRESS If It Don't Turn You On

B.T. EXPRESS
Do It 'til You're Satisified

Label : Scepter (Vogue)
Année : 1974
A1 Express
A2 If It Don't Turn You On (You Oughta' Leave It Alone)
A3 Once You Get It
A4 Everything Good To You (Ain't Always Good For You)
A5 Mental Telepathy
B1 Do It ('Til You're Satisfied)
B2 Do You Like It
B3 That's What I Want For You Baby
B4 This House Is Smokin'

Genre : Groovy Baby
6° morceau de L'Inventaire 50 : If It Don't Turn You On (You Oughta' Leave It Alone) 

Cet album figurait déjà dans L'Inventaire numéro 8. La chronique est ici.

THE RUTS You're Just A...

RUTS
The Crack

Année : 1978
Label : Virgin
A1 Babylon's Burning
A2 Dope For Guns
A3 S. U. S.
A4 Something That I Said
A5 You're Just A...
A6 It Was Cold
B1 Savage Circle
B2 Jah War
B3 Criminal Mind
B4 Back Bitter
B5 Out Of Order
B6 Human Punk 

Genre : Punk 
5° morceau de L'Inventaire 50 : You're Just A...

Arrivés relativement tard dans la vague punk anglaise, The Ruts sortent leurs premiers singles en 1978 et leur unique album studio un an plus tard. Leur chanteur mourra en juillet 1980 d'une overdose d'héroïne, conclusion d'autant plus triste que, dans leur courte discographie, les Ruts ont enregistré trois chansons dénonçant les ravages de la drogue... 
Leur musique est basique est efficace, évoquant parfois les Clash avec qui ils partagent une fascination pour les musiques jamaïcaines (rock steady, ska, reggae) et s'intéressent aux trafics sonores du dub émergeant. Les survivants du groupe monteront d'ailleurs un projet très orientés dub et collaboreront avec le grand bidouilleur Mad Professor
Il ne faut pas s'y tromper cependant, cet unique album est bien un classique du punk, avec ses accords secs et saturés, sa rythmique martiale et une colère bien palpable dans la voix mal dégrossie de Malcolm Owen (parfaitement illustré par You're Just A... choisi pour l'Inventaire 50). De façon plus surprenante, l'utilisation de flanger et certaines rythmiques sautillantes annoncent la new-wave faussement joyeuse de XTC. Mais The Crack reste surtout connu pour deux morceaux : Jah War, morceau de ska qui à sa place entre les grands classiques du label 2-Tone et les Clash de Sandinista, et Babylon's Burning qui figure toujours en bonne place dans les compilations nostalgiques de l'époque où les punks se baladaient en meute et sans chiens. 


THE SPOTNICKS THX 31250

THE SPOTNICKS
Never Trust Robots

Label : Président
Année : 1978
A1 Never Trust Robots    
A2 Amazing Stories    
A3 Close Discussions Of The Hird Kind    
A4 A World Of Spotnicks    
B1 Ultimate Planete    
B2 THX 31250    
B3 Six Strange World    
B4 You're Never Alone

Genre : Space instrumental
4° morceau de L'Inventaire 50 : THX 31250

Au départ, les Spotnicks sont l'équivalent suédois des Shadows ou des Ventures. Le groupe se forme dès 1961 et, si Bo Starander qui assure la guitare rythmique ne dédaigne pas donner de la voix, les Spotnicks se font vite une réputation par leurs instrumentaux où la guitare mène la danse, entre créations originales et reprises de classiques rock, surf, country et pop américaine.  
Mais ils se distinguent par une affection marquée pour la science-fiction, aussi ostensible dans leurs titres (Telstar, l'un de leur tubes, baptisé ainsi d'après un satellite,The Spotnicks Out-A Space, titre de leur album live à Londres...) que dans leurs tenues : sur scène et sur certaines pochettes le groupe porte des costumes de cosmonautes, pas forcément pratiques pour jouer de la musique mais en phase avec l'air du temps et incroyablement efficaces pour asseoir leur popularité. 
Au-delà de cet artifice, le son du groupe est en grande partie dû à son guitariste solo et leader, Bo Winberg, qui sera le seul membre constant des Spotnicks (l'affaire se délite dès le milieu des années 60) et créera ses propres effets pour la guitare, s'intéressant de très près à tous les bidouillages possibles, aussi bien en studio que sur scène. On lui devrait même l'un des premiers micros sans fil pour guitare.
Quand il enregistre ce Never Trust Robots en 1978, il est le seul membre originel des Spotnicks qui n'intéressent plus guère que leur pays d'origine, la Suède, et bien entendu le Japon, toujours prêt à entretenir un culte pour les groupes les plus anachroniques. 
Mais il s'agit en fait d'un disque totalement atypique dans leur discographie, enregistré en France et dont les compositions, toutes signées J. Bleck et R. Foxton (?*), évoquent une vague de musique synthétique et spatiale typiquement française que composent entre autres les groupes Space, Moon Birds ou encore l’agaçant Jean-Michel Jarre. La guitare y est presque incongrue au sein d'ambiances futuristes éthérées et parfois un brin discoïdes. Plein de souffles rasants, de sonorités bullesques, de bips et autres effets de filtres évoquant une discussion entre R2D2 et le jeu-ordinateur Simon, les huit morceaux pourraient tous servir d'illustration à un film d'entreprise de la COGIP. Entre Stratocaster et stratosphère, un album hybride, ringard mais bonnard.  

* Ça sent le pseudo : aucune occurrence de ces deux lascars nulle part ailleurs dans le monde merveilleux de la musique enregistrée  

THE CREATION How Does It Feel

THE CREATION 
Our music is red with purple flashes

Label : Demon Records
Année : 2015 (rec : 1966-68)
A1 Making Time
A2 Try And Stop Me
A3 Painter Man
A4 Biff Bang Pow
A5 If I Stay Too Long    
A6 Nightmares
B1 I Am The Walker
B2 Can I Join Your Band
B3 Cool Jerk
B4 Like A Rolling Stone
B5 Hey Joe
C1 Life Is Just Beginning
C2 Through My Eyes
C3 How Does It Feel To Feel (US Version)
C4 Ostrich Man
C5 Sweet Helen    
D1 How Does It Feel To Feel (UK Version)
D2 Tom Tom
D3 Midway Down
D4 The Girls Are Naked
D5 Bony Moronie
D6 Mercy, Mercy, Mercy
D7 For All That I Am
D8 Uncle Bert

Genre : Garage psychédélique
3° morceau de L'Inventaire 50 : How Does it feel (UK version)

Très peu de gens ont acheté leurs singles à l'époque, tout le monde les cite en exemple aujourd'hui. Dans la grande tradition des seconds couteaux de l'histoire de la pop, au concours du "groupe le plus sous-estimé du monde", The Creation tient une place de choix. 
Faut dire qu'ils avaient tout : l'attitude arty (ils furent probablement les premiers à intégrer des happenings à leurs prestations scéniques, juste avant le Velvet et la clique à Warhol), le look (classe mais décontracté, psychédélique sans faire baba-cool) et surtout le son, un mélange idéal de brutalité garage et d'ornements déviants qui leur vaudra aussi bien l'amour des punk que des plus expérimentaux des popeux. 
Pourtant, The Creation c'est à peine 10 singles pas franchement couronnés de succès, dont le premier, Painterman, sera le mieux classé : dixième place des charts en Allemagne et trente-sixième en Angleterre. Et, côté LP, à peine un album rapidement emballé pour l'Allemagne qui ne caracolera pas en tête des ventes. Aujourd'hui, bien entendu, tout ça s'arrache à prix d'or, et ce n'est pas une formule : l'édition française de leur 45t Tom Tom s'est vendue 1232 euros en 2012 ! Heureusement, des compilations abordables fleurissent régulièrement depuis les années 70.
On ne compte plus aujourd'hui les groupes et les artistes qui se réclament d'eux. Jimmy Page leur a piqué le coup de l'archet de violon détourné pour la guitare, Johnny Marr période The Smiths a piqué son look au guitariste Eddie Philips et Alan McGee leur a carrément piqué leur nom pour son label. Le journaliste rock Nicolas Ungemuth pense que c'est le meilleur groupe du monde (voir sa dithyrambe dans Garageland aux éditions Hoëbeke) et il n'est pas le seul... Mais tout ça est peut-être un poil exagéré !
Si leur statut de "groupe culte" n'est, pour une fois, pas usurpé, la courte discographie de The Creation ne transpire pas le génie en permanence. Leurs reprises, plutôt bien troussées, sont en concurrence avec celles d'une tripotée d'autres groupes de la même époque qui sublimaient l'exercice et leurs compositions originales sont assez inégales. 
Reste un groupe inventif et fulgurant qu'on aurait adoré écouter et surtout voir à l'époque et une poignée de titres irrésistibles, comme ce démentiel How Does It Feel dont nous ne nous lasserons pas.



KURTIS BLOW Rappin' Blow (Part 2)

KURTIS BLOW
(1st LP)

Label : Mercury
Année : 1980
A1 Rappin' Blow (Part 2)
A2 The Breaks
A3 Way Out West
B1 Throughout Your Years
B2 Hard Times
B3 All I Want In This World (Is To Find That Girl]
B4 Takin' Care Of Business

Genre : Old School/Good School
2° morceau de L'Inventaire 50 : Rappin' Blow (Part 2)

Il y avait Sugarhill Gang, Grandmaster Flash and The Furious Five... et on oublie toujours Kurtis Blow
Il est pourtant l'un des authentiques pionniers du rap, totalement immergé dans la culture hip-hop qui émerge durant les années 70, alors qu'il n'est encore qu'un adolescent. Il côtoie alors Melle Mel, Grandmaster Flash et surtout Russell Simmons, futur fondateur de Def Jam records, qui devient son manager et engage son petit frère, Joseph Simmons, encore lycéen, pour assurer aux platines derrière Kurtis. 
Bientôt va entrer en jeu Robert Ford, journaliste du Billboard magazine attiré par le rap qui s'acoquine avec Simmons et se met à composer pour son petit protégé. En 1979, dans la foulée du Sugarhill Gang, et quasiment en même temps que Grandmaster Flash ils sortent le premier maxi de Kurtis, Christmas Rappin', pierre angulaire du rap qui sera suivi par Rappin' Blow, tout aussi efficace et populaire. 
En 1980, arrive logiquement ce premier album sans titre, merveille de hip-hop old school, à peine entaché par deux ballades chantées sirupeuses, d'autant plus inutiles que Kurtis Blow est loin d'être un crooner. Reste son impeccable flow des premières heures et un groove solide, peut-être plus funky que ses deux concurrents directs.

JAMBINAI They Keep Silence

JAMBINAI
A Hermitage (隱棲은서) 

Label : Bella Union
Année :  2016
A1 Wardrobe
A2 Echo Of Creation
A3 For Everything That You Lost
A4 Abyss
B1 Deus Benedicat Tibi
B2 The Mountain
B3 Naburak
B4 They Keep Silence

Genre : Korean post rock
1° morceau de L'Inventaire 50 : They Keep Silence

Un premier EP en 2010, Différance en 2012, A Hermitage en 2016... Jambinai pose tranquillement ses jalons dans l'univers indéfini qu'on appelle, faute de mieux, le post-rock. 
Souvent comparé à Mogwaï en raison de leurs boucles hypnotiques jouées live et de leurs soudaines déflagrations sonores, Jambinai se distingue d'abord par son identité. Le groupe vient de Corée du Sud et intègre parfaitement les instruments traditionnels à leur son électrique. Kim Bo-mi joue du haegum, une espèce de violon qu'on tient à la verticale et dont le son lancinant est l'un des éléments essentiels de la construction sonore de leurs morceaux. Sim Eun-yong joue du geomungo, une sorte de sitar géante aux cordes épaisses qui tient lieu à la fois de basse et d'instrument percussif et qui lance d'ailleurs le morceau choisi pour démarrer ce mix : They Keep Silence. Entre les deux Lee Il-woo joue de la guitare électrique, chante quelques mélopées envoutantes et taquine d'autres petits instruments traditionnels coréens, notamment des flûtes. 
Régulièrement complété par une basse et une batterie, le trio semble avoir brisé quelques frontières entre tradition et modernité dans son pays d'origine et tourne beaucoup en Asie et en Europe. Aussi discrets et modestes en interview que puissants et fascinants sur scène, ils méritent le détour. En juillet ils seront aux Escales, à Saint-Nazaire. En attendant, ils ouvrent notre inventaire numéro 50.