lundi 19 août 2019

TwinSelecter radio - épisode 1 : Brainstorm

POISON GIRLS Other

POISON GIRLS
Chappaquiddick Bridge

Label : Water Wing Records (Og : Crass Records)
Année : 1980
A1 Another Hero    
A2 Hole In The Wall (Thisbe's Song)    
A3 Underbitch    
A4 Alienation    
B1 Pretty Polly    
B2 Good Time (I Didn't Know Sartre Played Piano)    
B3 Other    
B4 Daughters And Sons    
C Statement

Genre : Antiglamourous Punk
TS Radio 1 Brainstorm - Morceau 4 : Other

Poison Girls a déjà infiltré les Inventaires des Cercles Parfaits en 2012. Je venais de les découvrir, tout émoustillé d'avoir dégotté un groupe confidentiel de l'ère punk qui n'avait jamais fait l'unanimité mais me semblait avoir un son singulier, une démarche authentique, le tout emmené par une chanteuse mère de famille et quarantenaire, Vi Subversa, morte le 19 février 2016 dans une bien triste indifférence.
Depuis, m'étant procuré l'essentiel de leur discographie (trois albums studio et quelques EP tout aussi passionnants), je confirme la créativité et la cohérence d'un groupe dont le radicalisme politique n’empêchait pas une véritable ambition musicale, au contraire ! 
En témoigne ce Other lancinant et légèrement inquiétant qui figure sur ce premier album au climat oppressant et urbain. Chappaquiddick Bridge (qu'un petit label de l'Oregon a eu la bonne idée de rééditer dans une très belle édition agrémentée d'un 45t, comme le pressage original) devrait s'aligner dans toute discothèque paranoïaque qui se respecte aux côtés des premiers Suicide et Joy Division
Pour ne pas dénoter dans le mix, le morceau est coupé avant sa dernière partie. On peut l'écouter dans son intégralité ici.

JAMES HORNER Brainstorm Main Title

JAMES HORNER
Brainstorm (bande originale)

Label : Milan
Année : 1983
A1 Main Title    
A2 Lillian's Heart Attack    
A3 Gaining Access To The Tapes    
A4 Michael's Gift To Karen    
B1 First Playback    
B2 Race For Time    
B3 Final Playback/End Titles

Genre : Musique de l'espace
TS Radio 1 Brainstorm, Morceau 3 : Brainstorm Main Title

Mort en 2015 dans un accident d'avion, James Horner est passé à la postérité pour avoir commis la bande originale d'un des plus grands succès cinématographiques de tous les temps : Titanic
Généralement considéré comme un compositeur "classique" du cinéma, respectant les codes traditionnels des musiques de film, il a pourtant fait ses classes au Royal College Of Music avec György Ligeti, celui-là même qui fout les chocottes lorsque l'ascenseur déverse son sang dans Shining. James Horner a probablement appris avec lui la puissance de la dissonance et quelques audaces d'orchestration qu'on retrouve plutôt dans la première partie de sa carrière. 
Il faut dire qu'il débute dans les années 80 dans un genre qui lui laisse pas mal les coudées franches. Battle Beyond The Stars, Star Trek 2 et 3, Aliens, Cocoon... pendant près d'une décennie, il navigue essentiellement dans la SF à l'époque où le genre connaît une nouvelle jeunesse à Hollywood. 
Sa partition pour Brainstorm de Douglas Trumbull s'appuie sur un grand orchestre et une habile utilisation des voix pour créer un va-et-vient entre le merveilleux et l'angoisse. A l'image du vertige qui s'empare des personnages du film lorsqu'ils inventent et expérimentent cet appareil aussi fascinant que terrifiant : un magnétoscope qui peut enregistrer les sensations et les faire partager. 
Un peu ce qu'on essaie de faire sur ce blog...

CHRIS ISAAK Talk To Me

CHRIS ISAAK
Silvertone

Label : Warner Bros. Records
Année : 1985
A1 Dancin'
A2 Talk To Me    
A3 Livin' For Your Lover
A4 Back On Your Side
A5 Voodoo
A6 Funeral In The Rain
B1 The Lonely Ones
B2 Unhappiness
B3 Tears
B4 Gone Ridin'
B5 Pretty Girls Don't Cry
B6 Western Stars 

Genre : Beautiful lament
TS radio 1 Brainstorm, morceau 2 : Talk To Me

Avec son physique de "perfect american male", qui cherche sa place entre Elvis, James Dean, Chet Baker..., sa voix de mâle blessé par les aléas de la passion amoureuse, ses guitares brillantes et nostalgiques, Chris Isaak semble se lire comme un livre ouvert. Depuis ses premiers succès (Dancin' sur ce premier album puis Blue Hotel, en 1987, qui le révèle à toute l'Europe) il incarne ce crooner nostalgique des 50's, coincé dans une faille spatio-temporelle, ni tout à fait d'alors, ni vraiment d'aujourd'hui, aussi pathétique qu'un Silver Surfer en perpétuel exil cosmique. 
Pourtant, on sent bien que quelque chose se trame derrière ce visage et ces chansons trop lisses, comme si cette voix était le véhicule idéal pour passer la frontière qui sépare l'observation du voyeurisme, la souffrance du masochisme, la passion de l'addiction et ainsi de suite. Son Wicked Game accompagne les temps sulfureux de Sailor et Lula tandis que Kubrick choisit Baby Did a Bad Bad Thing en écho aux déviances d'Eyes Wide Shut
A bien y regarder, Talk To Me, deuxième morceau du premier album Silvertone annonçait déjà la couleur avec ses chœurs fantomatiques et l'incantation suppliante de la voix principale. En vérité je vous le dis, ce Chris Isaak n'est pas très sain.  



GEORG DEUTER Pearls

DEUTSCHE ELEKTRONISCHE MUSIK 3
Compilation

Label : Soul Jazz Records
Année : 2017
A1 Klaus Weiss : Wide Open Space Motion
A2 A.R. & Machines : I'll Be Your Singer, You'll Be My Song
A3 Deutsche Wertarbeit : Deutscher Wald
A4 Dzyan : Khali
A5 Missus Beastly : Geisha
B1 Alex : Derulé
B2 Agitation Free : In The Silence Of The Morning Sunrise
B3 Georg Deuter : Pearls
B4 Michael Bundt : The Brain Of Oscar Panizza
C1 Popol Vuh : Ja, Deine Liebe Ist Süsser Als Wei
C2 Novalis : Dronsz
C3 Bröselmaschine : Schmetterling
D1 Neu! : Neuschnee
D2 Between : And The Waters Opened
D3 La Düsseldorf : White Overalls
D4 Klaus Weiss : Constellation
E1 Achim Reichel : Tanz Der Vögel In Den Winden
E2 Roedelius : Lustwandel
E3 Pyrolator : Die Haut Der Frau
E4 Cluster : Hollywood
F1 Streetmark : Passage
F2 Niagara : Rhythm Go
F3 Michael Bundt : Neon

Genre : Free pop from Germany
TS Radio 1 Brainstorm, morceau 1 : Pearls

La discographie de Deuter est fortement dispensable, à moins de pratiquer la médiation où de chercher à intégrer une secte. Séduit lui-même par le gourou indien Bhagwan Shree Rajneesh lors d'un voyage spirituel, l'Allemand Georg Deuter lui dédiera de nombreux disques qui sentent le patchoulis et l'encens, dans lesquels la flûte, la guitare acoustique et quelques douces percussions le disputent aux sons de fontaines, de petits oiseaux et de vent dans les arbres... Le genre de truc qui donne envie de sniffer de la colle en s’enfonçant une épingle à nourrice dans le lobe de l'oreille.
Cependant, comme beaucoup de ses contemporains des années 70, Georg taquine le synthétiseur et fabrique des boucles aux sonorités réjouissantes qui sont parfaites pour ouvrir un mix !
Pour le reste, cet ultime volume des compilations que Soul Jazz consacre aux audacieux musiciens de la pop avant-gardiste allemande des années 70 est peut-être le meilleur des trois. L'absence du groupe Can y est largement compensée par un tas de découvertes hallucinantes, dont les 9 minutes de The Brain Of Oscar Panizza par Michael Bundt, mélange de groove puissant et d'expérimentations diverses qui finiront bien par intégrer un mix un de ces jours. 
Sans entrer plus dans le détail, soulignons que si le titre de ces compilations reste un peu abusif (la sélection est loin de se cantonner à la musique électronique), leur contenu permet d'embrasser la décennie dorée de cette formidable vague allemande sans s'épuiser et se ruiner à dénicher les albums originaux.


mercredi 20 mars 2019

Inventaire 52 - Saure Gurke

ULTRAVOX! Hiroshima mon amour

ULTRAVOX!
-Ha!-Ha!-Ha!

Label :Island Records
Année : 1977
A1 Rockwrok
A2 Frozen Ones
A3 Fear In The Western World
A4 Distant Smile
B1 Man Who Dies Everyday
B2 Artificial Life
B3 While I'm Still Alive
B4 Hiroshima Mon Amour

Genre : Nouvelle vague
7° morceau de L'Inventaire 52 : Hirsohima mon amour

Ultravox est aujourd'hui quasiment oublié. Le groupe fut pourtant l'un des fers de lance de la pop synthétique, notamment avec l'album Vienna, dont le single éponyme fut l'un des premiers marqueurs des années 80 balbutiantes. Le groupe produira quelques autres tubes, sortira 6 albums, et verra son chanteur Midge Ure commettre le caritatif Do They Know It's Christmas ? en compagnie du sinistre Bob Geldof, et, dans la foulée, participera au Band Aid en 1985 avant de séparer trois ans plus tard. 
Mais en fait cette histoire ne nous intéresse pas...
Il y a une première période dans la vie d'Ultravox, durant laquelle leur premier chanteur s'appelait John Foxx et leur nom portait un point d'exclamation en hommage au groupe allemand Neu!. Cette première ère compte trois albums, encore plus oubliés aujourd'hui que leurs successeurs. Le premier, sans titre, est produit par Brian Eno et Steve Lillywhite. Un mélange de l'air du temps punk avec quelques restes de tendance glam, comme un avatar du Roxy Music première période. 
Dans la foulée -Ha!-Ha!-Ha! garde encore un peu de ce côté cabaret cher à Brian Ferry, notamment dans son morceau d'ouverture Rockwrok, croisement bâtard entre le piano frénétique d'Elton John et cette brutalité cockney qui redistribue les cartes dans l'Angleterre de 1977. 
Mais sur la durée, l'album se révèle plutôt difficile à étiqueter, à la fois énergique et tenté par le romantisme, naïf et pertinent, il révèle un charme étrange 40 ans après. Brian Eno ayant lâché l'affaire, Steve Lillywhite et le groupe s'orientent vers un son brut, presque live, à la limité du chaotique mais pourtant toujours lisible, à l'image du brûlot Fear In The Western World. Ce n'est pas un album Punk, ce n'est pas encore de la New Wave, il y a des synthés parcimonieux et pertinents, même du violon planqué ici et là, et cette étrange chanson qui clôt l'album avec synthé, boîte à rythme et mélancolie : Hiroshima mon amour.
Après ça, le groupe sortira un troisième album produit par Conny Plank, mais le succès n'est toujours pas là. Leur label les lâche, John Foxx s'en va, et une autre histoire démarre... 


THE MATADORS Get Down From The Tree

THE MATADORS
Get Down From The Tree (Compilation)

Label : Munster Records
Année : 2011 (1966-68)
A1 Get Down From The Tree
A2 Old Mother Hubbard
A3 Hate Everything Except Of Hatter
A4 Sing A Song Of Sixpence
A5 You'll Be Mine
A6 I Think It's Gonna Work Out Fine
B1 Don't Bother Me
B2 I Feel So Lonely
B3 Láhev Kalorií
B4 Locomotion With You
B5 I Want To See You
B6 Extraction
C1 Indolence
C2 Farmer John
C3 Malej Zvon Co Mám
C4 My Girl
C5 Bad Bad Bird
C6 I'm So Lonesome (Out Of Reach)
D1 Shotgun
D2 Snad Jednou Ti Dám
D3 It's All Over Now Baby Blue
D4 I Must Hope
D5 Pay Pay Twist (Popeye's Theme)
D6 Zlatý Důl

Genre : Golden 60's
6° morceau de L'Inventaire 52 : Get Down From The Tree

Tomber sur la compilation d'un groupe de rock tchèque dont on n'a jamais entendu parler excite forcément la curiosité de l'auditeur compulsif, mais ne garantit aucunement la qualité. 
D'où la bonne surprise à l'écoute de ce double LP des Matadors qui s'en sort plus qu'honorablement tout au long de ses 4 faces. Certes, il y a quelques morceaux prévisibles, voire anecdotiques (I Think It's Gonna Work Out Fine ou l'instrumental ringard Locomotion With You) mais d'entrée les Matadors posent un son. La basse est bien lourde, la guitare électrique brute, sèche, enclenche la pédale fuzz quand il faut, le batteur est généreux en roulements et un orgue omniprésent rappelle immanquablement The Seeds et ? and the Mysterians. Avec la voix un peu gueularde du chanteur principal et son accent anglais mâtiné d'Europe de l'Est, on tient une identité, d'autant plus cohérente que la plupart des morceaux sont des compositions originales qui n'ont pas rougir de la comparaison avec celles de leurs contemporains anglais ou américains. Pas étonnant quand on sait que cette compilation est due à l'excellent label espagnol Munster qui touche sa bille en matière de garage rock et de pépites sixties.
Pop, jerk, mersey beat, blues, garage, un brin de psychédélisme, tout y passe avec, quelques fois, le plaisir d'entendre enfin un vrai rock dans leur langue d'origine. On trouve même en fin de face B un instrumental qui part en sucette pendant près de 6 minutes avec fuzz, wah-wah, dérapages d'orgue et probablement de synthé, reverb, delay, chambre d'écho... Mais pour faire connaissance, on a préféré choisir leur "tube" qui donne son nom à la compilation.
Apparemment leur nom viendrait de l'orgue Matador qu'ils étaient censés promouvoir et sur lequel jouait Jan "Farmer" Obermayer. La formation originelle s'est produite essentiellement en Allemagne de l'Est et a connu un véritable succès entre ses débuts en 1965 et ses derniers singles en 68. D'autres musiciens récupéreront le nom et reprendront le flambeau, ils passeront en Allemagne de l'Ouest pour accompagner la version germanique de la comédie musicale Hair...

Pour en savoir plus sur The Matadors...

DON PULLEN Poodle Pie

DON PULLEN 
Tomorrow's Promises

Label : Atlantic
Année : 1977
A1 Big Alice
A2 Autumn Song
A3 Poodie Pie
B1 Kadji
B2 Last Year's Lies And Tomorrow's Promises
B3 Let's Be Friends

Genre : Deviant jazz groove
5° morceau de L'Inventaire 52 : Poodle Pie

Il a collaboré avec Nina Simone, fait ses classes avec Charles Mingus et a puisé son inspiration chez l'un des fondateurs de l'Art Ensemble of Chicago, Muhal Richard Abrams. On lui doit une petite trentaine d'albums sous son nom et de multiples collaborations mais il semble complètement oublié aujourd'hui...
Don Pullen s'est promené dés les années 60 dans le free jazz et l'avant-garde en retrouvant l'essence du piano, instrument à percussion dont il pouvait jouer avec les doigts, les mains entières, les épaules, et tout ce qui permet de frapper sur les notes... Évitons de lui coller des étiquettes ou d'en faire un phénomène de foire cependant, après trois albums avec Mingus (Moves, Changes One & Two), le pianiste a gagné son autonomie et sort des albums qu'on rangera difficilement dans un bac précis. Jazz certainement, mais la notion reste vague. A l'image du Poodle Pie choisi pour l'Inventaire 52, les morceaux de Don Pullen peuvent ressembler à du jazz groove un peu léché de chez CTI, puis partir en vrille à la première occasion. Aussi funky que dissonant, l'artiste passe du populaire label Atlantic au plus déroutant Black Saint avec un naturel qui force l'admiration. Autre leçon tirée de l'Art Ensemble : aussi osées que soient ses improvisations, elles gardent ce côté ludique qui leur évite de basculer dans le cérébral pénible.
Sa discographie ne se croise pas tous les matins, tant mieux : il reste certainement encore plein de belles choses à découvrir.

SKIP MARTIN Cuckoo cha cha

SKIP MARTIN
Perfidia/Cuckoo cha cha

Label : Vogue
Année : 1961 ?
Genre : Exotica cha cha
 4° morceau de L'Inventaire 52 : Cuckoo cha cha

Lors d'un petit salon du disque, dissimulés derrière des 33t rares et chers, plusieurs dizaines de 45t n'attendaient que moi. Mambo, cha cha, grands orchestres latinos ou orientalisants, tout le gratin de l'exotica 50/60 se retrouvait là. Perez Prado, Miquel Cordoba, Manuel de Gomez y sus cansados, le groupe Ping Ping... Les noms d'artistes promettaient monts et merveilles !
Après une écoute rapide et une négociation à l'amiable, je repartais avec une quinzaine de disques et le sourire béat du ramasseur de champignon qui vient de tomber par hasard sur un coin à cèpes.
Parmi les découvertes, ce Cuckoo cha cha, face B du standard Perfidia par Skip Martin et son orchestre. L'artiste est oublié aujourd'hui. Il fut tout d'abord arrangeur pour big bands, notamment ceux de Count Basie, Benny Goodman et Glenn Miller. Dans les années 50, ses qualités d'orchestrateur l'amènent à Hollywood où il collabore à des comédies musicales, dont la plus grande d'entre toutes : Singin' In the Rain
Également compositeur et chef d'orchestre, il signera une dizaine d'albums entre 1956 et 1962, dont deux volumes de la série "Perspectives", très prisée pour ses pochettes. L'un de ses faits de gloire est une adaptation du Schéhérazade de Rimski Korsakov en version swing : Sheherajazz
Moins ambitieux, plus ludique, ce Cuckoo cha cha se construit sur deux notes au sifflet imitant le chant du coucou qui répondent à un motif rythmique à la cloche. Se déroule ensuite un irrésistible cha cha mid tempo sur lequel on imagine facilement les derniers fêtards un peu ivres, en smokings débraillés et robes de soirées chiffonnées, se déhancher en titubant, tandis que l'aube commence à poindre sur la Riviera...

THE SEQUENCE Funk You Up

THE SEQUENCE

Funk You Up (short version)/
Funk You Up (long version)

Label : Sugar Hill Records
Année : 1979
Genre : Old School/Good School
3° morceau de L'Inventaire 52 : Funk You Up (short version)

Voici donc le premier single enregistré par un groupe de rappeuse, The Sequence, un trio signé backstage lors d'une prestation du Sugarhill Gang par la tenancière du label historique : Sylvia Robinson
Leur histoire est courte : 4 ans (1979/83), quatre albums et une série de singles/maxis où le rap naïf et funky des origines côtoie quelques ballades synthétiques et sucrées qui accusent leur âge. 
Peu importe, le trio fait date, le morceau aussi qui inspirera Dr Dre, De La Soul et sera adoubé par l'immense Erikah Badu dans Love Of My Life Worldwide. Elle ne se contente pas d'y reprendre le "Ring, ding, dong, ring-a, ding, ding, dong" dans le refrain, mais invite carrément Angie Stone, survivante du trio, à venir l'accompagner dans cet hommage aux côtés de Queen Latifah et Bahamadia
Fait moins glorieux, The Sequence attaquera même Mark Ronson et Bruno Mars qui auraient samplé ce Funk You Up pour leur tube Uptown Funk (ce qui n'est pas évident à la première écoute). 
C'est un peu fort quand on sait que Funk You Up s'est lui-même largement inspiré du Rapper's Delight de Sugarhill Gang, lui-même pompé sur Good Times de Chic, etc, etc.

SIX BY SEVEN Bochum (Light Up My Life)

SIX BY SEVEN
04

Label : Saturday Night Sunday Morning Records
Année : 2004
A1 Bochum (Light Up My Life)   
A2 Catch The Rain    
A3 Sometimes I Feel Like...    
A4 Ocean    
B1 "................"    
B2 Ready For You Now    
B3 There's A Ghost    
B4 Say That You Want Me    
C1 Lude II    
C2 Leave Me Alone    
C3 Lude I    
C4 Hours    
D1 She Didn't Say    
D2 Pretty Baby    
D3 Ready For You Now (Original Version)

Genre : Epic shoegaze pop
2° morceau de L'Inventaire 52 : Bochum (Light Up My Life)

La brit pop des années 90 n'est plus qu'un tas de cendres quand Six By Seven débarque en 1996. Ne parlons même pas de la micro vague "shoegaze" avec son romantisme enfoui sous des couches de saturation à laquelle on tente parfois d'affilier ce groupe.
Ils arrivent donc au milieu de nulle part et la légende veut qu'ils aient vidé une salle, pleine de représentants de maisons de disques venus pour les signer, en jouant un morceau de 15 minutes. Ils s'acharnent et finissent par atterrir chez Mantra Recordings, une filiale de Beggars Banquet où ils côtoient de façon un peu surréaliste des artistes très éloignés de leur répertoire comme Natacha Atlas et Fun-Da-Mental. La carrière de Six By Seven s'annonce donc compliquée et elle le sera, malgré un noyau de fan qui se constitue très vite et ne les lâchera jamais, tout au long d'une carrière chaotique.
Il faut dire que le groupe ne fait aucun effort côté communication. Ils n'apparaissent que rarement sur leur pochette, leur clip sont anti-glamour au possible (Eat Junk Become Junk notamment) et plus généralement, leur côté punk est contrebalancé par des envolées lyriques qui semble embarrasser les amateurs d'étiquettes. Si dans un premier temps Six By Seven semble juste décalé (leur premier single Candlelight aurait fait merveille 8 ans plus tôt en pleine période "baggy groove") il trouve dès leur deuxième album leur ton, une curieuse mixture très électrique, un empilement de couches saturées emportées par la voix un peu nasillarde de Chris Olley. Quelques incendies punk-rock surgissent parfois mais, dans l'ensemble, les morceaux sont longs, tout en progression et finissent parfois par se ressembler. 
Pour ne rien faciliter, il y a des va-et-vient dans le personnel du groupe. Leur maison de disque les lâche au troisième album et ils se voient donc contraints de monter leur propre structure, Saturday Night Sunday Morning Records, qui hébergera aussi leurs projets parallèles. Aujourd'hui, le groupe se résume à Chris Olley qui pratique une espèce de krautrock dénaturé...
N'empêche, si vous mettez très fort ce Bochum qui ouvre le quatrième album, par exemple le matin en allant prendre votre douche, il n'est pas exclu que vous creviez votre plafond. C'est toute l’ambiguïté de la discographie de Six By Seven : parfois ennuyeuse, parfois irrésistible. 

AKSAK MABOUL Saure Gurke

AKSAK MABOUL
Onze danses pour combattre la migraine

Label : Kamikaze (Re : Crammed Discs)
Année : 1977
A1 Mercredi Matin
A2 (Mit 1) Saure Gurke (Aus 1 Urwald Gelockt)
A3 Animaux Velpeau
A4 Milano Per Caso
A5 Fausto Coppi Arrive!
A6 Chanter Est Sain
A7 Son Of L'Idiot
A8 DBB (Double-Bind Baby)
A9 Cuic Steppe
A10 Tous Les Trucs Qu'il Y A Là Dehors
B1 Ciobane
B2 The Mooche
B3 Vapona, Not Glue
B4 Glympz
B5 Three Epileptic Folk Dances
B6 Autre Chose D'Autre    
B7 Mastoul Alakefak
B8 Comme On A Dit

Genre : Autre
1° morceau de L'Inventaire 52 : (Mit 1) Saure Gurke (Aus 1 Urwald Gelockt)

Les types vont bientôt fonder Crammed Discs, un label ouvert sur l'électronique et les "musiques du monde" à une époque où le terme n'existait même pas. Mais il ne le savent pas encore en 1977. Ils s'appellent Marc Hollander et Vincent Kenis, ils jouent de plein d'instruments et s'intéressent à toutes les musiques. 
Dans cet album sans queue ni tête mais plein d'inspiration, il y a un peu de reprise (une comptine, un morceau de Duke Ellington...), la mise en musique d'un traité médical du XIXe (Chanter est sain), l'ouverture d'un opéra dédié à Fausto Coppi, une enfant qui chante furieusement, des influences berbères et pygmées et roumaines... On y joue de tas de claviers différents plus ou moins synthétiques, du darbouka, du xylophone, du sax, de la clarinette, du violon et de l'accordéon, de la mandoline, de la boîte à rythme rudimentaire et puis quoi encore ? Des voix parfois. Aksak Maboul c'est moins intello que Zappa. De l'absurde qui retombe sur ses pieds. Ça se range chez les ludiques irrésistibles, pas loin de Don Cherry et Pascal Comelade
Les ventes à l'époque furent relativement confidentielles, mais l'album est devenu une espèce de référence souterraine, un objet du culte qu'il est de bon ton d'évoquer (mais pas évident à passer) en soirée. Et aujourd'hui l'original vaut cher, bien sûr...
Heureusement, il y a les rééditions et les émissions de radio qui permettent de faire remonter tout ça à la surface. C'est moins romantique qu'un grenier ou une malle au trésor, mais ça sert aussi à ça la radio : rattraper le temps perdu tout en laissant filer son imagination.